« Le train avait une heure de retard. La gare vomissait des hordes de passagers à chaque passage d’un train. Les horaires défilaient sur le tableau digital et ma mère s’énervait de voir le mien sans cesse retarder, elle avait pris rendez-vous chez le coiffeur. Son portable sonna et elle soupira en demandant à sa secrétaire d’annuler sa coupe. Elle n’avait pas le temps, un rendez-vous qu’elle ne pouvait absolument pas annuler aurait lieu à quinze heures trente précises. Le train serait là à quatorze heures douze, ce qui lui laissait tout juste le temps de retourner au bureau qui était à l’autre bout de la ville et à traiter les dossiers en attente.

Quand le moment fut venue de me dire au revoir, elle déposa un simple baiser sur ma joue et n’attendit même pas de voir le train partir. Sous ma main, la poignée de ma valise avait épousé la forme de ma main. Je m’avançai dans le wagon, jetai adroitement mon paquetage au-dessus de moi et prit place en première classe. Tout le long du voyage, je regardai le paysage défilé. L’impatience qui se lisait dans mon regard sembla émoustiller la personne assise de moi, car le jeune garçon qui devait avoir à peu près le même âge que moi commença à jouer avec ses doigts. Il me proposa des jeux auxquels je dus refuser de participer, au risque de lui casser la main. Il avait un visage fin, des cheveux courts, un sourire qui avait dû faire chavirer beaucoup de cœurs. Le mien était cependant… »

Kenneth s’interrompit. Il regarda ses mains, puis le visage d’Ethan. Il ne pouvait pas continuer sa phrase. Ses pas le menèrent à la fenêtre de leur chambre, il regarda les élèves qui se précipitaient dehors pour profiter un peu de leur temps libre. La suite de son récit, il la connaissait sur le bout des doigts. La raison pour laquelle il était parti en train. Ce qu’il trouva en arrivant. Les larmes montaient à ses yeux et il ne voulait pas qu’Ethan les voit. Alors qu’il était si souriant, empli d’espoir en pensant à la vie qu’ils allaient mener tous les deux. Cette faiblesse qu’il retrouvait au côté de son meilleur ami, cette vulnérabilité qu’il ne dévoilait qu’à lui… Tout à coup, il aperçut son reflet larmoyant. Il détourna le regard, se dirigea vers Ethan et le plaqua doucement contre le lit. Doucement, sans aucune force. Son récit s’était interrompu de lui-même, le voyage pour venir ici l’avait épuisé. Il ne pensait qu’à une chose, dormir, s’assoupir quelques instants.

Des larmes s’écoulèrent sur les joues d’Ethan. Ce n’était pourtant pas les perles du musicien, mais celle que Kenneth laissait tomber sur lui, ses genoux posés des deux côtés des hanches de son ami. Il approcha timidement sa tête près du visage d’Ethan puis posa celle-ci juste au-dessus de son épaule gauche. Son corps sembla alors perdre toute consistance et il s’endormit. Sa respiration était constante, il n’émettait aucun ronflement malgré la position de laquelle son corps commençait à se détendre. Quelques minutes, quelques heures ? Il ne voulait pas ouvrir les yeux. Qu’allait-il voir, si ce n’était le visage accusateur de son ami suite à sa conduite des plus étranges ?

Edit Joyce : XD Kenneth ça ta pas perturbé de poster dans la chambre des filles Xd